Comment séduire le public passant lors d'action de médiation scientifique ?

Publié par astu 'sciences, le 21 février 2018   3.8k

Quelques conseils pour animer un public passant 

Fête de la science, villages scientifiques, animations de rue… il n’est pas simple d’attirer l’attention d’un public dit  « passant ». Pourtant, il reste celui que tout acteur de la culture scientifique souhaite captiver car il représente le public qui ne vient pas naturellement à lui.

Ce texte est le résultat d’une réflexion d’un groupe de travail de médiateurs et chercheurs habitués à intervenir auprès des passants dans des cadres différents (marché, centres commerciaux,  places de villes et villages…)

Qu’est-ce que le public passant ?

Selon le Larousse, un passant est une personne qui se déplace à pied sur une voie publique. Il n’est par définition « pas captif » et le plus souvent il n’a pas prévu de venir  à votre rencontre. Cette dernière se fait généralement  par le biais du hasard.

Le public passant est aussi celui dont les disparités sociales et culturelles restent une composante inconnue qui demande une capacité d’adaptation forte dans la manière d’animer.

Néanmoins, et malheureusement, le lieu d’animation qu’il soit en centre-ville, dans certains quartiers ou village, peut parfois prédéfinir la dominance d’une certaine catégorie sociale. Il n’en va pas de même, heureusement,  avec la curiosité et les centres d’intérêts culturels.

Il existe deux types de public passant :

  • Celui des villages scientifiques et autres évènements qui vient dans une démarche culturelle et papillonne de stand en stand. Ce public est déjà le résultat d’une sélection de personne en démarche de se cultiver.
  • Celui de la rue qui, avant de sortir de chez lui, n’a pas envisagé une minute de vous trouver sur son chemin.

Nous nous intéresserons plus particulièrement à ce dernier public. 

 

Du passant au public

Pour commencer par une lapalissade : les passants passent et la question commence là. Pourquoi passe-t-il ?

L’inconnue de leurs parcours, de leurs pensées en ont fait les muses de nombreux poètes. Notre groupe de travail, « passant » à ses heures, s’est donc attelé à imaginer une liste de raisons non exhaustives de leur passage seule ou en groupe : flâner, faire les courses, faire les boutiques, être en transfert entre deux lieux, être en découverte de la ville, chercher sa route, en touriste, aller à un rendez-vous, promener les enfants, aller manger, promener le chien, courir. ..

Ces différentes raisons s’accompagnent aussi de différentes postures : être au téléphone, être dans ses pensées ou au contraire tout observer, écouter de la musique, draguer, chercher le contact humain, ou l’inverse, l’éviter à tout prix, être pressé, méditer, être affamé, être en sueur, être en questionnement…

 Ainsi, tous ces paramètres vont engendrer le fait que ce public va être plus ou moins disponible pour vous accorder quelques minutes. Il est donc important d’observer les comportements afin de ne pas vivre la terrible expérience des regards terrifiés ou agacés par l’éventualité d’une vente forcée, d’une pétition ou encore d’un sondage.

Par exemple, une famille en promenade ou encore des touristes seront plus disponibles pour ce genre d’animation.

Si l’intervention se passe à l’extérieur, il est évident que les conditions météorologiques conditionneront la disponibilité des passants. La tendance à la flânerie et à l’observation de ce qui nous entoure est plus élevée par beau temps.

Selon la source populaire qu’est Wikipédia : « Le public désigne les lecteurs d'un livre ou d'un journal, les spectateurs d'une pièce de théâtre ou d'un film, les téléspectateurs d'une émission de télévision, les internautes qui surfent sur internet. On parle aussi dans ce cas d'assistance ou d'auditoire. »

 Vous aurez donc votre public à partir du moment où le passant sera vis-à-vis de vous en posture d’écoute, de spectateur, de lecteur ou encore mieux d’interlocuteur.


Capter et fixer son public

Si nous partons du principe que capter un public signifie attirer son attention et que le fixer est l’acte de conserver cette attention, alors nous pouvons conclure que l’animation se passe en deux temps.

Néanmoins, le deuxième temps n’apparaît pas comme une obligation. La sensibilisation à un sujet peut simplement passer par quelques secondes d’attention. Cela dépend des objectifs assumés de l’animation.

Nous pouvons considérer que l’attention est captées quand le passant s’arrête, hésite, regarde, sourit, écoute, sent et/ou enfin pose une question.

D’une manière générale, une famille sera plus facile à capter du fait de la présence des enfants dont il est admis que tout support d’apprentissage est bon pour son développement.

La posture d’apprenant n’est pas aussi évidente chez l’adulte car elle peut mettre en situation « d’ignorant ». Il sera donc important d’aborder les sujets soit en valorisant les savoirs et savoir-faire, soit par le divertissement. 


La carotte et/ou l’entrave

Attirer le public est certainement l’étape la plus difficile. Il a été décelé deux grandes méthodes :

  • La carotte qui correspond à une promesse  
  • L’entrave qui comme son nom l’indique « entrave » le parcours initialement prévu des passants

La carotte

La carotte utilise  la motivation comme biais de captation. Elle offre une promesse sur ce que vous allez leur apporter. Pour cela, elle peut : mettre en avant une question de tous les jours, surprendre, mettre en avant une célébrité ou quelque chose de connu, intriguer, dérouter (mélanger les disciplines), jouer sur l’actualité, jouer sur les émotions, faire une approche théâtrale, spectaculaire, visible, interpeler sur le local…

En résumé, l’objectif est d’obtenir un « effet badaud » qui va attirer du monde.

Et comme le dit le vieil adage « le monde attire le monde » pour deux raisons. Il offre la promesse de vivre quelque chose d’intéressant tout en restant dans l’anonymat.

L’utilisation  de la carotte nécessite, de fait, la poursuite d’une animation qui va fixer le public soit par le spectaculaire, soit par une expérience participative. L’enjeu le plus dur est de ne pas rompre la promesse, de ne pas décevoir.

 

L’entrave

L’entrave a la particularité de pouvoir se suffire à elle-même. Contrairement à la carotte, elle n’engendre pas l’obligation de fixer son public.

Cette méthode a pour principe de modifier le parcours (l’entraver, l’orienter), freiner la vitesse de déplacement, rompre le quotidien, l’espace.

Si l’objectif est simplement d’interpeller les passants sur un sujet sans intention de les garder, les supports utilisés peuvent être visuels (images, films, objets, panneaux énormes etc.) ou sonores (bruits, musiques, tirades, etc.)

Si par contre, votre objectif est de poursuivre une animation, l’entrave peut aussi se faire de manière active en diminuant la distance avec les passants en sortant de l’espace d’animation ; soit, en allant à leur rencontre.

 

Savoir s’arrêter

Enfin, le dernier point à retenir est de ne pas oublier que les passants restent des passants qui naturellement vont retourner à leur objectif de départ.

Une animation trop longue sera donc contre-productive. Il convient aussi d’êtres plusieurs ou de bien gérer son animation pour ne pas laisser de côté les nouveaux arrivants.


 Vous avez compris ? Bien ! Passons alors…


Hélène Brignon - chargée de projet à astu'sciences