Les Petits Papiers : Espace & Transports avec Alain Quilliot

Publié par astu 'sciences, le 21 avril 2021   1.4k

"Les Petits Papiers" : une série d'articles à thème donnant la parole aux scientifiques, chercheurs ou passionnés des sciences.  Les petits papiers, ce sont des entretiens retranscrits sous formes d’articles sur des thématiques scientifiques et diverses.

Pour sa première édition, la série abordera la thématique de l’Espace.  Aujourd'hui, c'est à travers un entretien réalisé avec Alain Quilliot, directeur de laboratoire au sein de l'ISIMA/LIMOS, que nous aborderons la mobilité spatiale et les véhicules intelligents.

Pourriez-vous nous parler de votre parcours ainsi que des différentes études que vous effectuer à l’IMoBS3 ?

Mon parcours d’études commencent à l’École Supérieure de Paris. Par la suite, j’ai travaillé au Mexique, ainsi qu’aux États-Unis pour ensuite intégrer l’Institut Technique de Grenoble. Cela fait, à présent, 33 ans que je suis professeur à Clermont-Ferrand. Dans un premier professeur en informatique, pour enseigner, par la suite, en faculté de sciences, à Polytech et à l’ISIMA.

Dans le cadre de mes activités de directeur du LIMOS, un laboratoire du CNRS et durant les programmes d’investissement (PIA), se sont lancés les chantiers Labex, Idex et Ipex. À ce moment-là, j’ai décidé de raccrocher le laboratoire LIMOS à ces différents programmes. En parallèle, l’ensemble de ces actions nous a mené à nous impliquer dans l’IMOBS3 pour ensuite le rattacher à celui-ci.

L’IMobS3 est centré sur la robotique et le véhicule intelligent, c’est le noyau dur de ce programme. Le raccrochage du LIMOS s’effectue sur les aspects services, dont la manière à laquelle peuvent servir ces véhicules intelligents ou ces générations de robots dans un cadre systémique. Notre collectif est entré au sein du LABEX IMobS3 par le biais des systèmes et des services et de leurs utilisations dont on ne possède pas toujours la connaissance. Un système n’est pas uniquement développé pour innover, il est nécessaire qu’il soit utile. De la même manière, notre collectif a intégré le Laboratoire d'excellence ClerVolc, ainsi que des projets relatifs sur l’environnement.

Au sein du laboratoire d’excellence IMobS3, vous développez trois challenges (que vous appelez aussi défis), pourriez-vous nous expliquer chacun de ces différents challenges, leur objectif ainsi que leur application dans la vie de tous les jours ?

Les activités principales ayant motivé le Laboratoire d'excellence  IMobS3 existaient déjà depuis 2011, année de création du LABEX. Ces activités se concentrent autour du véhicule autonome. Elles sont développées, en grande partie, par ce qui est, aujourd’hui l’Institut Pascal, à l’époque le LASMEA, mais également développées, par l’INRAE, anciennement le CEMAGREF (le Centre de recherche sur le machinisme agricole). MICHELIN possédait, à l’époque, un intérêt pour les objets nouveaux. Le défi 1 a vu le jour, il centralise son savoir sur le objets et robots industriels. Les deux défis restants se sont greffés par la suite.

L’axe 2 se concentre essentiellement sur les matériaux et les nouvelles énergies. Le coeur de ces robots sont des moteurs, des systèmes de contrôle commandés, des systèmes de perception alimentés en amont, en énergie. Cette énergie est électrique mais parfois, elle peut provenir de l’hydrogène. En l’occurrence, cette hydrogène ne serait pas produit par électrolyse mais par photolyse, c’est-à-dire par effet du soleil ou encore par bio masse. Mon travail est particulièrement impliqué dans ce défi, c’est un axe qui concerne les usages et la manière dont ces nouveaux véhicules peuvent être incorporés dans des services à l’intérieur d’une ville, d’un système de logistique urbaine ou rurale.

Traiter les différents problèmes d’organisation, de modélisation, de pilotage est essentiel si le but est de rendre ces services économiquement viables et efficaces du point de vue de la sûreté. Quand on parle de véhicules autonomes, la question des problèmes de sécurité est de sûreté est primordiale. Comment les contrôler pour qu’ils atteignent des missions dans de bonnes conditions, à la fois économique et sociale ?  Ce sont les trois grands défis que nous développons.

À quoi cela peut-il servir ? Quel peut être le futur de ces technologies au sein de la société et de nos environnements ? C’est relativement compliqué puisque de facto, toutes ses recherches sont à l’état du prospectif tant sur le volant « énergies » que sur le volant des « véhicules autonomes ». Actuellement, l’homme est capable de produire de l’énergie électrique via le nucléaire, les barrages ou éventuellement la photovoltaïque. La production d’hydrogène se fait essentiellement par une masse relativement importante d’électrolyse, c’est-à-dire pat l’émission d’électricité. L’hydrogène à partir de photolyse est plus difficile à réaliser, elle n’est pas encore possible dans des conditions fiables. Est-ce qu’elle le sera dans le futur ? 

Les enjeux futurs autour des véhicules autonomes sont difficiles à évaluer. Ce n’est pas évident de déterminer jusqu’où ces objets arriveront à maturation, ni à quoi ils pourront servir. Google, Tesla, de nombreuses firmes vendent leurs produits mais la réalité opérationnelle est en de-ça de ce qui est vendu. Pour le moment, il est difficile d’envisager technologiquement des véhicules purement autonomes dans des espaces fréquentés ou publics.  La notion de risque est extrêmement importante. Il est donc nécessaire d’envisager des applications très ciblés, type systèmes industriels, systèmes d’entrepôts ou systèmes d’exploitation de grands terrains agricoles. 

Sur une application où les véhicules évolueront en espace peuplé ou urbain, ils se caractériseront plutôt par des assistances « intelligentes » que par des véhicules 100% autonomes. Un drône est un objet télécommandé et non complètement autonome. 

À partir de là, l’idée est d’intégrer une partie de la mobilité urbaine en zone rurale. Ce sont des milieux particulièrement non desservis et peu fréquentés. Typiquement, ce serait de créer des systèmes de mobilité flexibles, utiliser des navettes, taxis collectifs pouvant alimenter des zones rurales ou urbaines qui seraient un intermédiaire entre la voiture individuelle et le transport collectif. Les personnes handicapés seraient, dans un premier temps, les cibles adéquats pour l’utilisation de ces systèmes puisqu’elles sont les utilisatrices majoritaires des transports à la demande. Des utilisations en milieu clos, industriel ou agricole sera plus facile à mettre en place. 

Quelles innovations, en terme de mobilité et de personnes, sont à ce jour le plus dominant dans vos recherches, au niveau local. Auriez-vous des exemples, des applications dans la vie de tous les jours ou cela reste-il toujours à l’état prospectif ?

Ces technologies avancent très doucement. L’intelligence artificielle, au sens étymologique du terme, est une » simulation des processus de perception humaine, de raisonnement par des ordinateurs. » 

Que peut-il se faire de nouveau en Auvergne ? Tout auvergnat souhaiterait que notre région soit détentrice de nouvelles découvertes. Le fait est, malheureusement, que cette problématique n’est pas exceptionnel et que les véhicules et transports autonomes intéressent un bon nombre de personnes. C’est un fantasme que des découvertes inouïes et complètement nouvelles soient découvertes exclusivement en Auvergne.

Néanmoins, au niveau des véhicules intelligents, l’Auvergne concentre ses recherches sur le guidage et essentiellement la vision. Ce n’est pas l’unique aspect traité mais il a été démontré qu’il était possible d’avoir des procédés de guidage efficace accouplés à des techniques de vision artificielles par caméra et donc permettre une reconnaissance de formes de façon dynamique sur des images. C’est une technologie innovante et originale. Mais est-ce ce type de technologies qui dominera ? Il en est de même pour certaines recherches sur l’hydrogène solaire. Une entreprise comme Air Liquide (AL) produit de l’hydrogène par électrolyse. 

Au niveau des services, l’étude se fait sur les modèles de systèmes de transport à la demande, de modélisation, de transports de coûts en tenant compte du facteur sûreté.

Selon vous, comment peut-on extrapoler l’ensemble de ces technologies au domaine du transport et du voyage spatial ? 

L’extrapôler serait hasardeux. Le transport spatial reste quelque d’assez rare. Certains parlent d’organiser du tourisme sur la lune, mais cela ne concernerait pas le citoyen lambda. 

La gestion de systèmes de flottes aller-retour ne va pas se poser. Les problèmes classiques de contrôle à distance, de communication par satellite vont être les mêmes. Aux États-Unis, des chantiers sont en cours, à l’ONERA par exemple (Organisme public travaillant pour le spatial) sur des problématiques de robots et de pilotage de flottes de robots. Certains chantiers travaillent sur l’utilisation de ses véhicules, sur les objets autonomes pour réaliser des missions et tâches sur la Lune ou sur Mars telles que de la collecte d’informations, de matériaux ou de travaux de construction de station.

Clermont-Ferrand n’est donc pas pas un acteur privilégié dans le traitement de ces recherches car cela nécessite des forces stratégiques et une articulation certaines avec l’industrie du spatial. Il y a une époque, quand l’avion a commencé à se développer, où pas mal de personnes fantasmaient sur l’avion pouvant potentiellement remplacer la voiture dans les villes. On pouvait notamment le voir dans les bandes dessinées, les ciels urbains traversés et parsemés de petits véhicules volants.  Fâcheusement, ce n’est pas encore le cas et le ciel de Clermont-Ferrand n’est toujours pas parsemé de petits véhicules volants. À noter que deux véhicules, tels que la voiture, qui se frottent, est potentiellement gênant mais deux avions qui collisionnent, est très dangereux et augmente le risque de dégâts importants.

Pour conclure, aujourd’hui, les véhicules envoyés dans l’espace sont guidés, calculés et loin d’être 100% autonomes mais l’utilisation d’objets intelligents pour la réalisation de tâches et autres activités de maintenance et de collecte sur la Lune commence à se développer. 



Découvrez l'ensemble des actions du programme scientifique de Laboratoire d'excellence IMobS3 et de ses 3 défis 

DÉFI 1       DÉFI 2   DÉFI 3


Cette semaine, retrouvez "Les Petits Papiers" quotidiennement afin d'en apprendre plus sur l'espace. 

Jeudi, les petits papiers revient pour un entretien effectué avec Marcello Brigante, enseignant-chercheur à l'UCA au sein de l'Institut de Chimie de Clermont-Ferrand, sur Espace & Environnement. Nous aborderons l'atmosphère et l'impact des possibles polluants dans l'environnement.